Sonnet pour un fantôme

Ce qu’il resta d’un goût, nouveau sur mes lèvres,

Tout le jour s’exhala, autour de moi, sans fin :

Cuivre, cuir, feuilles et fleurs, métal, feu, soufre enfin ;

Vous parti, lui restant : fort, puissant, rien de mièvre !

 

Mes vaisseaux, mes artères, ma chair et ma plèvre,

Imprégnés, palpitants :  le désir et la faim

hier m’ont tenaillée ;  mon passé ce défunt ;

Ce qui s’empare de moi : la douceur et la fièvre.

 

Libations, festoiements, tels seront nos voyages ;

Terra incognita, sans aucun équipage,

Vers elle nous allons, mais ne nous hâtons pas.

« Nous consumer », dis-tu… Nous pourrions faire naufrage,

Nous perdre l’un et l’autre, parmi ces paysages ;

C’est un risque, en effet, si nous pressons le pas.